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Petite histoire de la cuisine française

A quoi reconnaît-on une bande dessinée d'Astérix ? Au banquet final du village bien sûr ! Après leurs aventures et une fois leur barde solidement ligoté et bâillonné, les irréductibles gaulois dévorent des sangliers en buvant de la cervoise. Même si nous ne mangeons que rarement des sangliers, le plaisir de bien manger et la convivialité du repas sont typiquement français. Disney a naturellement choisi ce thème pour son film inspiré de notre culture, Ratatouille. On y retrouve l’univers des grands restaurants parisiens et des critiques gastronomiques et c’est le célèbre plat méditerranéen qui permet à Rémi de sauver le restaurant du grand Gusteau. La cuisine est en effet un symbole national qui irrigue notre pays des villages bretons aux restaurants les plus réputés.


Mais comment avons-nous acquis cette affection si particulière pour la gastronomie ? Pourquoi nous cassons-nous la tête à suivre des recettes à la lettre en regardant Top Chef alors que nos voisins anglais se contentent de poisson pané avec des frites et que nos amis allemands ne se lassent pas de leurs saucisses ?

Pour tenter de répondre à ces questions, nous vous proposons une petite histoire de la cuisine française.



L’histoire de la cuisine française


C’est au milieu du Moyen-Âge, avec la parution des premiers livres de cuisine écrits en français que la cuisine française apparaît. Cependant, ces livres ne précisent ni les proportions des ingrédients ni les temps de cuisson, plus difficile qu’avec Marmiton donc ! A cette époque, seule l’aristocratie et en particulier le roi, peut manger non seulement pour se nourrir mais aussi pour apprécier sa nourriture. À la cour, des cuisiniers professionnels comme Taillevent, le chef des cuisines de Charles V, recherchent les accords les plus savoureux et fondent les bases de la cuisine française. Au-delà des papilles du roi, le repas est aussi l’occasion de montrer sa richesse et son pouvoir. De très nombreuses personnes sont donc conviées au repas du roi et le regardent manger les nombreux plats de viande ou de poisson qui lui sont servis.


Avec la découverte de l’Amérique en 1451, les Européens découvrent une multitude de nouveaux produits qu’ils ramènent chez eux. Ainsi, les épices (comme le gingembre) mais aussi les viandes (comme la dinde) ou encore les légumes (comme la pomme de terre, la tomate, la courge ou le haricot) diversifient les recettes et notamment les sauces qui accompagnent les viandes.


Puis, au XVIe siècle, l’usage du beurre se développe et il remplace les autres graisses comme le lard. Son utilisation est alors autorisée tous les jours de la semaine. Jusque-là elle était en effet interdite certains jours par l’église qui définissait les « jours gras », où l’on pouvait manger de la viande et de la graisse animale et les « jours maigres » où l’on devait se contenter de poisson.


Au siècle suivant, les livres de cuisine commencent à donner, en plus des recettes, des conseils d’organisation, comme celui de couper au préalable les légumes ou de dénoyauter en avance les olives. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui la « mise en place ». Ces conseils techniques marquent le début de la professionnalisation de la cuisine française. Avec ces livres, le savoir-faire des professionnels est théorisé et transmis au public avec pédagogie. Cela conduit à une intellectualisation de la cuisine, qui devient un art. La notion de gourmet apparaît : c’est un connaisseur de la cuisine qui ne mange pas pour se rassasier mais pour savourer, à la différence du gourmand.


Le développement de l’imprimerie à partir de 1450 permet de diffuser plus largement les techniques et recettes culinaires, comme avec le Grand dictionnaire de la cuisine d’un auteur davantage connu pour conter les aventures des Mousquetaires, Alexandre Dumas. Le nom de « Grand dictionnaire » n’est pas usurpé puisque son livre compte plus de 3000 recettes ! Certains livres de cuisine français sont traduits dans d’autres langues, notamment en anglais, ce qui diffuse cette cuisine en Europe.


Après la Révolution française, les chefs de cuisine des nobles se retrouvent sans emploi et ouvrent les premiers restaurants. Ils y servent des bouillons ou bien des breuvages réconfortants que l’on appelle « restaurants » et qui donnent leur nom au lieu où on les consomme. Les critiques gastronomiques apparaissent à leur tour et publient les premiers guides gastronomiques, comme l’Almanach des Gourmands en 1803.


Au XIXe siècle, le dressage, c’est-à-dire l’apparence des plats, prend une importance majeure. Les livres de cuisine s’enrichissent alors d’illustrations. C’est la naissance de l’esthétisme culinaire : on compare par exemple la présentation du plat au cadre d’un tableau. Les cuisiniers rivalisent de créativité pour flatter l’œil des convives en créant des décors en graisse et en gelée, ils inventent ainsi la cuisine architecturale.


Cependant, avec les révolutions industrielles et l’essor de la bourgeoisie d’affaires, les Français passent moins de temps à table. Les cuisiniers doivent alors renoncer à leurs créations grandioses et simplifier leurs dressages pour permettre aux convives de manger plus vite.


C’est aussi au XIXe siècle que le service à la russe remplace le service à la française. En effet, jusque-là on servait tous les plats en même temps, ce qui supposait de disposer de grandes tables et nécessitait une logistique lourde en cuisine. Le service à la russe veut à l’inverse que l’on serve les plats progressivement et par portions, ce qui permet de manger chaud et de préserver le goût des mets.


Au début du XXe siècle, Auguste Escoffier publie Le guide culinaire, considéré encore aujourd’hui comme une référence. Il diffuse la cuisine française à l’étranger en étant tour à tour chef du Grand-Hôtel de Monte-Carlo, du Carlton de Londres et des hôtels Ritz à Paris et à New York. Escoffier professionnalise la cuisine en créant l’organisation en brigades et en instaurant la rigueur des techniques culinaires. C’est aussi le créateur de la célèbre pêche Melba. Parallèlement, Michelin lance la publication du Guide rouge qui répertorie les meilleurs restaurants.



Le chef Auguste Escoffier


Dans l’entre-deux guerres, les recettes régionales sont mises en avant. On publie des cartes des spécialités et des livres de recettes dédiés. Les plats régionaux sont alors servis dans la capitale, ce qui leur confère une véritable légitimité.


Avec l’essor économique des Trente Glorieuses, le tourisme se démocratise et le grand public découvre les restaurants. Puis, dans les années 1970, les normes sociales évoluent et le public souhaite une cuisine moins grasse. La cuisine française simplifie alors ses recettes et allège certaines préparations. On cherche à ne pas dénaturer le goût des produits, notamment en réduisant le temps de cuisson.


En 2010, la cuisine française est consacrée par son inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO.



Pourquoi une telle culture culinaire en France ?


L’historien Patrick Rambourg explique le succès de la cuisine française par l’équilibre qu’elle a su trouver entre la précision et la créativité. Elle a en effet défini des codes et des techniques qui permettent une cuisine de qualité tout en laissant une place à la créativité, ce qui lui a permis de s’adapter aux évolutions de la société et de se renouveler. Il note aussi que les savoir-faire des cuisiniers professionnels se sont diffusés dans toute la société et ont été adoptés par les particuliers, ce qui en fait véritablement une culture nationale.

Il relève enfin la grande diversité de la géographie de notre territoire, qui comporte des climats océanique, méditerranéen, mais aussi montagnard, semi-continental et même tropical. Cette géographie permet une grande diversité des aliments et contribue à la richesse de notre cuisine.


La cuisine française de nos jours


L’intérêt des Français pour la cuisine ne se dément pas. On peut le voir grâce au succès des émissions de cuisine, à l’essor de youtubers spécialisés et à la popularité des sites et blogs de cuisine. On note aussi le développement des cours de cuisine qui permettent d’apprendre avec les conseils de professionnels.

La cuisine française évolue avec les changements d’habitudes alimentaires et s’adapte aux enjeux climatiques. Les grands repas avec de nombreux plats laissent la place à des repas plus légers avec des mets plus originaux. On porte une attention croissante à la saisonnalité des produits pour limiter l’empreinte carbone. La cuisine est aussi plus végétale et moins grasse. Certains chefs expérimentent enfin de nouvelles idées en utilisant des produits exotiques, en associant les goûts sucrés et salés, en s’essayant à la cuisine moléculaire ou encore en réalisant des trompe-l’œil.


Servi au restaurant "Privé de dessert", ce Paris-Brest en trompe-l’œil est en fait un magret de canard !

Sur ce, bon appétit !



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